Interview
Nous avons rencontré Vincent Souday, docteur spécialisé dans la médecine
hyperbare et subaquatique au Centre Hospitalier Universitaire d'Angers.
Nous
avons pu interviewer le Dr Souday en novembre, ses réponses à nos questions nous ont
beaucoup éclairées et nous ont aussi permis d'affiner notre travail. Nous le
remercions pour le temps qu'il nous a consacré, ainsi que la précision à laquelle il a répondu à nos questions et enfin pour sa gentillesse et son
professionnalisme. Vous retrouverez tous les détails de l'interview dans le
script ci-dessous.
INTERVIEW DU DR. SOUDAY
PRESENTATION DR SOUDAY
Durant son internat, le Dr. Souday pratiquait beaucoup la plongée. Il était par conséquent, intéressé sur les risques médicaux liés à cette activité.
Le Dr Souday a donc réalisé des études de médecine et a passé le concours de l’internat, après il a choisi comme spécialité la pneumologie et a ensuite eu son diplôme. Il a aussi fait des diplômes optionnels, comme celui de la plongée et celui de la réanimation.
Pendant les études de médecine, les risques de plongée ne sont pas enseignés, il faut faire une spécialisation.
Pour cela, il a suivi cette formation et devenu médecin dans le service de réanimation et médecine hyperbare du CHU d’Angers.
LES RISQUES EN PLONGEE
Quels sont les risques sur
l’organisme humain en profondeur ?
Pouvez-vous nous expliquer les différents paliers en
plongée ?
Les paliers de décompression sont
faits pour éviter les accidents de décompression, les accidents liés à l’azote.
Ils seront nécessaires lorsque l’organisme sera trop enrichi en azote. Les
plongées profondes et/ou toutes les plongées longues nécessitent de faire des paliers. Si vous ne restez pas trop longtemps sous l’eau (15-30 min) il n’y
aura pas de palier à faire, effectivement quand on ne descend pas très profond
on peut rester très longtemps en plongée.
Il y a-t-il de plus en plus de
cas d’accidents de plongée ? Et pourquoi ?
Non, parce que, de manière
générale, l’enseignement de la plongée est bien fait. Dans « les
pays développés », toutes les personnes qui vont faire de la plongée font
ça dans un club et elles sont donc prévenues à l’avance. Il y a 40 ans les
personnes étaient beaucoup moins informées alors qu’aujourd’hui elles sont
énormément informées donc il y a moins d’accident.
Sauf dans certains pays dans le
monde où les plongeurs n’ont pas d’informations, ils ne connaissent pas les
risques liés aux accidents de plongée ou de décompression.
Ce n’est pas parce que l’on
respecte parfaitement les règles de sécurité qu’on ne fera pas d’accident.
Il y des facteurs de risques de décompression quand on est
moins en forme, plus âgé (plus d’une soixantaine d’année), il y a des petites
variantes anatomiques pour pouvoir expliquer l’accident.
La plongée est un sport à risques.
Prenez-vous aussi les cas d’accident en altitude (de
pression atmosphérique) ? Si non, pourquoi ?
Quelle est la différence entre la pression atmosphérique et hydrostatique ?
La pression atmosphérique est la pression exercée par l’air
au niveau 0 de la mer.
La pression hydrostatique, c’est la pression exercée par
l’eau lorsque l’on est dans l’eau. En pratique, quand vous êtes au niveau de la
mer, vous avez juste la pression atmosphérique qui est sur vous. Par contre
quand vous faites de la plongé, vous avez non seulement la pression
atmosphérique qui est au-dessus de l’eau et en plus la pression hydrostatique.
Pour simplifier la pression hydrostatique entre 0 et 10 mètres est multipliée
par 2, entre 10 et 20 m la pression est de 3 bars et ainsi de suite.
Au niveau 0 de la mer, il y a 1 bar de pression atmosphérique.
La pression absolue, lorsque l’on fait de la plongée, c’est le fait de calculer les bars en fonction de la pression atmosphérique. La pression relative, c’est le fait de compter que la pression hydrostatique et non la somme de la pression hydrostatique et la pression atmosphérique.
Si nous remontons en altitude, il y aura moins d’air au-dessus de nous donc la pression va être moins importante. Il va y avoir une hypobarie liée à l’altitude. Alors que si nous allons sous l’eau, la pression va augmenter et nous allons nous retrouver en hyperbarie. D’où les accidents de plongée, qui sont liés à l’hyperbarie et les accidents en altitude qui sont dus à l’hypobarie.
Quelle expérience pourrait expliquer les risques en
altitude/profondeur ?
Verre d’eau dans une piscine :
Quand on veut aller toucher le fond de la piscine, on a mal
aux oreilles, tout le monde pense que c’est la pression sur le tympan, alors
qu’en pratique derrière le tympan dans l’oreille il y a de l’air. Quand nous
descendons sous l’eau, l’air de l’oreille est comprimé donc le volume diminue
donc cela aspire notre tympan à l’intérieur et c’est cela qui fait mal. C’est
donc une dépression à l’intérieur de l’oreille qui fait mal.
Comment faire pour éviter d’avoir mal aux oreilles ?
Il faut souffler en se bouchant le nez et en pinçant la bouche. Les plongeurs rétablissent ainsi la pression à l’intérieur de leur oreille. Le tympan se remet en place. C’est la Manœuvre de Valsalva.
Il faut souffler en se bouchant le nez et en pinçant la bouche. Les plongeurs rétablissent ainsi la pression à l’intérieur de leur oreille. Le tympan se remet en place. C’est la Manœuvre de Valsalva.
Comment réagit l’organisme humain face à la pression ?
De façon innée l’homme ne va pas sous l’eau puisqu'il n’est pas
fait pour aller sous l’eau. C’est contre sa nature, son organisme n’est pas
adapté.
Pour les accidents de décompression, il faut faire des paliers.
Pour les accidents biochimiques, et les risques de crises
hyperoxiques, dès que cela commence il faut remonter. En cas de Narcose, les
hommes de la palanquée aident le plongeur à remonter, c’est à eux de se rendre
comptent de son état. Le fait de remonter de quelques mètres diminue les
pressions des gaz et les symptômes disparaissent.
En altitude, les hommes font la même chose, si les
personnes ne se sentent pas bien il faut redescendre au plus vite vers les
plaines. Il y a peu de population qui vit en altitude, néanmoins l’organisme
peut s’adapter.
LE NAUTILUS ET LES SOINS
Pouvez-vous nous expliquer le rôle du Nautilus (le caisson
hyperbare) ?
Nautilus ; caisson hyperbare. Ici, les caissons
servent à augmenter la pression à l’intérieur. C’est intéressant pour les
accidents de plongée. Dans le caisson, il y a seulement de l’oxygène pur sans
azote.
Quand on fait un accident lié à la décompression, l’idée
est de faire disparaître les bulles d’azote dans l’organisme humain. On fait
respirer l’oxygène pur à forte pression dans le caisson, on va créer des gradients
de pression très importants entre la bulle d’azote et l’extérieur où il n’y a
que de l’oxygène, la bulle va progressivement disparaître.
Comment soignez-vous ces problèmes ?
L’organisme va se défendre, il y a plein de cellules – les
plaquettes – qui vont se coller sur les bulles, et qui vont boucher les
vaisseaux, donc on propose des médicaments pour fluidifier le sang et limiter
ces risques-là.
L’essentiel est de sortir de l’eau dès que des symptômes
apparaissent, d’être au repos et de respirer de l’oxygène. Et ensuite d’être
dans le caisson situé dans un centre de médecine hyperbare.
Qu’est-ce qu’une séance ? Comment se déroule-t-elle ?
Combien de temps dure-t-elle ? Combien de séances sont nécessaires ?
La
séance sera plus ou moins longue, selon la gravité de l’accident, de 2h à 6h ou
7h. On peut être amené à refaire 1 à 2 séances dans les 24h si le plongeur
n’est pas remis. Ensuite, au besoin, il peut y avoir de la rééducation. Il y a un suivi des patients après avoir été dans le caisson.
Il y a-t-il des effets secondaires après une séance en
caisson hyperbare ?
Oui. Il y a donc les mêmes risques que lorsque l’on
pratique la plongée, car la pression exercée correspond à un niveau de
profondeur de 18 m. Donc des traumatismes peuvent avoir lieu dans le caisson, on
fait respirer de l’oxygène pur, aux patients, il y a donc le risque de
convulsions
Quels soins apporter vous en plus à ces personnes ?
Recherche par le médecin de pourquoi le patient a fait ce
type d’accident. Et au besoin une rééducation est faite dans un autre service.
Combien de personnes soignez-vous chaque année grâce au
caisson hyperbare ?
Au CHU, d’Angers, 300 personnes sont soignées au caisson
tous les ans, mais seulement 12 sont des accidents de plongée en moyenne.
Est-il
dangereux pour une personne n’ayant subi aucun traumatisme hydrostatique de
rentrer dans ce caisson ?
Il y a les mêmes
risques, pour quelqu’un qui entrerait dans le caisson sans avoir eu d’accident
de plongée, donc le même risque que de pratiquer de la plongée.